(Atelier de lecture à « Haute Voix » avec J-Cl Drouot)
Le regard pétillant, comme celui d’un enfant, me frappe en premier lieu. Il y a cette sorte de frontière entre ce que le corps traduit, la voix mais surtout la gestuelle. Jean-Claude Drouot est là, face à moi, un grand sourire aux lèvres.
Prêtes pour l’aventure de la lecture à « haute voix », c’est de bon matin que mes compagnes arrivent une à une. L’intimité de notre groupe fait que, tout de suite, un dialogue franc et sincère s’installe. Nous nous présentons, et le Grand Homme aussi ! Oh, qu’il n’aimerait pas que je le nomme ainsi, et pourtant, c’est ce qu’il est !
Durant cet atelier, chacun fait son voyage personnel, le texte colore notre humeur et prend une dimension qui nous fera sortir de nous-mêmes. La belle « humanitude » (merci à toi Véronique) du « Passeur » est un régal à chaque mot. Son sens du « vrai », du « sincère », passe dans toutes les phrases de nos lectures parfois bredouillantes face à l’expérience, qui pourtant, nous invite à nous libérer. « Sois disponible, détendue ! » dit-il à l’une. « Libère-toi ! » conseille-t il à l’autre. « Prenez du plaisir et n’essayez pas de convaincre. » annonce-t-il encore. Mettre à jour notre identité réelle n’est pas chose aisée. Même si notre projet de lecture est similaire à celui de raconter, comment ne pas subir le dictat de la phrase ? Patiemment, il écoute, concentré, empathique : « Ne capturez pas le texte, c’est lui qui vous conduit. » explique-t-il. Alors, craintivement, nous restons en retrait, sans oser vraiment. En comprenant, cependant, mais en nous questionnant sur la loyauté de notre attitude à nous accrocher, telles des gouttes de pluie, à la musicalité, à la fluidité du texte, de la pensée de l’auteur. Parfois, l’intention de Jean-Claude Drouot se fait intimidante et pourtant tellement juste.
Les heures s’écoulent et le premier jour est déjà fini. On se salue, la tête remplie de mots. Fébriles que nous sommes à nous retrouver le lendemain, d’autres lectures sous le bras. Celles-là, nous ne les avons pas relues, pour laisser la place à la spontanéité. Et le rêve se poursuit. Les auteurs défilent et les sourires se dessinent : quel bonheur nous avons ! Notre « Passeur » a lui aussi apporté ses lectures et nous les confie afin de savoir si ses mots ont laissé une empreinte fidèle dans nos cerveaux, depuis la veille. Et soudain, voilà que sans effort, nous comprenons petit à petit que la respiration, l’articulation et l’éducation de l’appareil vocal sont autant de mesures pour lire également la partition des mots. Jean-Claude Drouot témoigne, se livre, explique, sourit en pensée à ce qu’il a été, est et restera toujours avec l’humilité qui le caractérise. L’homme est là, devant nous, fier de ses racines, de ses ancêtres, de son parcours qu’il hésite à nommer « destin », tant il a été judicieux de le choisir de la sorte.
C’est un ami, un « parent » de lecture que nous quittons à regret, quand la nuit tombe déjà sur la petite salle abritant notre « famille ». Des larmes coulent, des adresses s’échangent, des photos se prennent et nous nous dispersons dans le manteau feutré du soir. Dans l’intimité de notre cœur, nous osons remercier notre chance d’avoir pu partager ces instants de grâce avec un homme passionné, passionnant et terriblement attachant.
Cathy Marchand-van den Daële, Auteure