Des fruits enchanteurs - Le Pavé

Des fruits enchanteurs

Belle de Thuin, Triomphe de Vienne, Transparente de Croncels, Beurré de Mérode, Sabot d’Eysden, Alexandrine Douillard, Notaire Lepin,  Prune de Prince, Soldat Laboureur, Jeanne d’Arc, Belle Fleur, Reine des vergers, Ananas de Courtrai….

Au moment de choisir un arbre fruitier, comment résister à tant d’appellations prometteuses ? Noms d’inventeurs ou dédicaces à quelque Belle ou ancien Héros, noms réfèrant à une qualité particulièrement savoureuse ou esthétique, noms de lieux bien utiles pour déterminer une origine régionale adaptée à votre sol et au climat.

La poésie des noms anciens de pommiers, poiriers, pruniers, cerisiers et autres font chavirer notre imaginaire et prêtent à se détourner définitivement des commerciales variétés « modernes », aux noms de marques et aux sonorités étrangères à nos terroirs. Basta les Golden, Jonagold, Elstar, Valor, Granny Smith disponibles à foison dans les grandes surfaces. 

Et ce choix sera récompensé ! Car nos créateurs de variétés anciennes savaient choisir l’arbre aux fruits les plus délicieux, les plus résistants aux maladies et les mieux adaptés aux usages et à une conservation qui à l’époque se passait d’installations frigorifiques sophistiquées.

Eh oui, il fut un temps où les greniers de nos grands-mères abritaient jusqu’au printemps des trésors de fruits certes de plus en plus ratatinés, mais toujours sucrés et goûteux.

Les semis de pépins étaient courants et les jardiniers prenaient le temps de voir grandir des centaines de rejetons dont seuls quelques rares donneraient peut-être un fruit intéressant. Ces quelques élus étaient baptisés, soignés et multipliés. Et le temps et l’usage décidaient ensuite des variétés les plus aptes à traverser les âges.

Nos aïeux inventèrent des milliers de variétés dont bien peu nous sont parvenues, car la fruticulture contemporaine a vite fait d’éliminer les souches les moins productives, les moins « belles », les moins adaptées au transport et à la conservation artificielle.

Une multitude de saveurs, de textures et de qualités innombrables ont ainsi été perdues et c’est trop tardivement que quelques passionnés, associations et institutions se sont intéressés à sauver ce qui pouvait l’être encore, d’abord sous forme de vergers conservatoires, puis de reproduction et de promotion de variétés anciennes. 

Il existe de nombreuses listes, assorties des qualités propres à chaque fruit, goût, fertilité, période de récolte, et usage : de table (ou à couper), à cuire (au four ou en compote),  à cidre, de conservation…

Alors, d’ici la mi-mars, plantez des fruitiers, refusez les piteux standards commerciaux et cherchez la perle rare ! Vous contribuerez ainsi à sauvegarder un patrimoine génétique précieux et original. 

Et si vous avez du temps devant vous, pourquoi ne pas semer des pépins, et devenir à votre tour Inventeur d’une variété qui portera votre nom, celui de votre village ou de votre amour !

Plus d’infos :
http://www.cra.wallonie.be/fr/services/ressources-genetiques-fruitieres-1
http://croqueurs-national.fr/

Gérard Thèves,
Action Nature asbl